L’évolution de la température océanique
On pense que la masse océanique est devenue stable il y a 3,9 milliards d’années. Ceci dès que le bombardement météoritique massif de la Terre a pris fin. En fait, le volume des océans n’a pas beaucoup changé durant les 4 milliards d’années passées. Par contre, on est sûr que la chimie de ces océans a beaucoup évolué durant ce laps de temps. Depuis la formation des océans, il y a environ 4 milliards d’années, la température a diminué d’environ 230°C, jusqu’à la valeur actuelle de 20°C à la surface. Une telle décroissance est compatible avec une atmosphère initiale composée principalement dioxyde de carbone CO2. De fait, le déclin progressif de la quantité de CO2 dans l’atmosphère entraîne une diminution de l’effet de serre.
L’évolution de la température océanique au cours des âges peut être déduite de l’analyse du rapport δ18O = 18O/16O. Le mieux est de mesurer ce rapport dans des chailles. Il s’agit d’une roche dure composée de grains de silice extrêmement fins (silex, jaspe, onyx, etc.). On a pu ainsi constater que les rapports δ18O de l’eau et des chailles décroissait au fur et à mesure que la température des océans augmentait. Ceci, en raison du fractionnement isotopique lié à la précipitation de la silice contenue dans l’océan. Par conséquent, en mesurant le rapport δ18O de chailles d’âges différents, on peut se faire une idée de l’évolution de la température des océans au cours du temps.
Les chailles Archéennes
Les mesures réalisées sur des chailles de l’Archéen suggèrent que de telles roches se sont formées à partir d’un océan 50°C plus chaud qu’aujourd’hui. Mais, ce résultat a été contesté. Car, il pourrait aussi très bien refléter la variation de composition isotopique du rapport δ18O des anciens océans. Toutefois, la valeur δ18O = 0 ± 3 ‰ pour l’eau de mer moyenne de référence au cours du protérozoïque suggère que la signature isotopique des océans n’a pas varié de manière significative au cours des éons écoulés. Le problème avec de tels paléo-thermomètres est l’origine douteuse des chailles de l’Archéen. La plupart d’entre eux semblent avoir été formés à partir de gels de silice ayant précipité en milieu hydrothermal.
Les températures déduites des rapports δ18O pourraient donc très bien refléter la température de précipitation de la silice à partir de fluides hydrothermaux. Et, non la température de l’eau de mer ambiante. Une méthode alternative pour mesurer la température des océans primitifs pourrait faire appel à l’analyse de l’eau de mer contenue dans des inclusions de roches anciennes. On a pu ainsi retrouver de telles inclusions d’eau de mer dans des oxydes de fer de la ceinture rocheuse de couleur verte de Barberton en Afrique du Sud. De fait, ces roches sont âgées de 3,2 à 3,5 milliards d’années. Elles semblent provenir de dépôts émis par les bouches hydrothermales de sols marins datant de l’Archéen.
Cette interprétation a été récemment contestée. Ceci, sur la base que ces roches sont principalement composées de goethite α-FeOOH. Il s’agit un oxyhydroxyde, instable thermiquement, pouvant dériver de la dissolution, à une époque quaternaire, de sidérites Archéennes. Il se pourrait donc que ces oxydes de fer soient des dépôts jeunes de sources sub-aériennes. Et, qu’ils ne contiennent aucun témoin des environnements Archéens. À l’opposé, une remobilisation du fer aurait pu avoir lieu au cours d’une érosion quaternaire. En effet, les inclusions de fluides de ces oxydes de fer présentent des textures primaires et des témoins géochimiques qui militent en faveur d’une origine Archéenne incontestable.
Il se pourrait donc que les fluides contenus dans de telles inclusions ont été préservés à des conditions de température et de pression différentes (profondeur) des fluides originaux. Par conséquent, a séparation de phase aura eu lieu au sein de ces inclusions. Dans le cas de l’eau de mer, le changement de température et de pression peut produire une séparation de la phase saline du liquide. Un chauffage ou un refroidissement de la roche homogénéise les phases contenues dans les inclusions. On peut donc en déduire la température de formation. Dans le cas de ces oxydes de fer, on a pu déduire une température de 39°C, valeur inférieure de 70°C à celle suggérée par le rapport δ18O des chailles. Maintenant, l’étape suivante est de comprendre comment le pH des océans a évolué au cours du temps.
Référence
Daniele L. Pinti (2005), «The Origin and Evolution of the Oceans», Lectures in Astrobiology, Vol. 1. M. Gargaud, B. Barbier, H. Martin & J. Reisse Eds, Springer-Verlag, New York, Berlin, p.83-112.
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