Étoiles

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L’eau autorise la naissance des étoiles et des planètes

Tout le monde sait que tout être vivant naît dans l’eau. De plus, sans eau aucun accouchement ne serait possible. Savez-vous que c’est également l’eau qui autorise la naissance des étoiles et des planètes [1] ? En effet, les étoiles naissent suite à l’effondrement gravitationnel de nuages moléculaires denses. De fait, au tout début, le nuage est extrêmement froid avec une température inférieure à -240°C.

Dans de telles conditions toute l’eau se trouve sous la forme d’une croûte de glace amorphe enrobant chaque grain de poussière. Puis, il y a la pression gravitationnelle. Au fur et à mesure que le nuage s’effondre sur lui-même, il se forme une protoétoile. Celle-ci rayonne donc une grande quantité d’énergie sous la forme de lumière. Elle éjecte aussi de la matière de manière très violente sous la forme de jets bipolaires. L’image suivante et la vidéo associée montre à quoi ressemblent de tels jets dans la réalité :

Jet stellaire capturé par le télescope Hubble
Jet stellaire HH-47 capturé par le télescope Hubble (http://spacetelescope.org/images/opo9524g/) long de 5 000 milliards de kilomètres

Avant l’étoile : la lumière, la poussière puis l’eau

Une telle émission de lumière et de matière a pour but de transporter l’énergie en excès et le moment angulaire vers l’extérieur de l’objet central. Donc, quand cette énergie et les jets de matière rencontrent le milieu ambiant dense, il y a absorption de la lumière. D’où production d’ondes de chocs, ce qui provoque un échauffement rapide du nuage. Par conséquent, lorsque la température des grains de poussière dépasse -180°C, les croûtes de glace se subliment. D’où la formation d’eau vapeur. De plus, au-delà de 25°C, tout l’oxygène atomique se trouve transformé en molécules d’eau :

O•• + H2→ OH• + H•
O•• + H2 →H2

Ceci, à condition que le rapport carbone sur oxygène soit inférieur à 1. Car, si tel n’est pas le cas, il y a plutôt formation de monoxyde de carbone CO au lieu de vapeur d’eau H2O. Ainsi, la teneur en eau du nuage s’accroît de plusieurs ordres de grandeur. Par conséquent, l’eau devient la molécule la plus abondante après l’hydrogène moléculaire H2. On obtient ainsi une abondance en eau de 10−9 à 8×10−8 par rapport à l’hydrogène moléculaire [2]. Toutefois, comme ce dernier est un très mauvais réfrigérant, c’est à l’eau que revient le lourd fardeau de refroidir le milieu gazeux.

Refroidissement

En effet, l’eau vapeur possède un spectre d’énergie très riche dans la gamme infrarouge (λ = 3-200 µm). Car, il existe dans cette molécule, de nombreux niveaux d’énergies de rotation et de vibration bien séparés. Ceci confère donc à la molécule d’eau un excellent pouvoir réfrigérant. De fait, il existe de multiples canaux d’émission photonique autorisant une conversion efficace de l’énergie thermique des collisions en lumière infrarouge.

Ainsi, au fur et à mesure de l’évolution de la protoétoile, le nuage autour de cette dernière se trouve graduellement dispersé dans l’espace. Toutefois, s’il reste suffisamment dense, l’eau peut se déposer à nouveau sous la forme de glace amorphe à la surface des grains de poussière. Ainsi, elle reste présente jusqu’à la formation d’un système protoplanétaire. Ce dernier finira donc par se condenser sous forme de planètes, de comètes ou de météorites, objets tous extrêmement riches en glace.

Eau et comètes

Lorsqu’une comète, s’approche suffisamment près d’une étoile, la sublimation de la glace va produire de grandes quantités d’eau à raison de 10 000 tonnes par seconde [3]. Ceci donne donc naissance aux magnifiques queues de ces objets extra-planétaires. Les météorites quant à elle vont enrichir les planètes en eau en s’écrasant à la surface de ces dernières. Par conséquent, cela permettra l’apparition de l’eau liquide sous la forme d’océans.

Pour que cela arrive, il faut que la taille de la planète soit ni trop petite, ni trop grande. De plus, elle doit également être ni trop proche, ni trop loin de l’astre central. En effet, il faut savoir que cet enrichissement en eau venue de l’espace se produit de manière perpétuelle. De fait, chaque jour, la planète Terre est percutée en une minute par 5 à 30 petites comètes. Ceci correspond donc à une arrivée d’eau extra-terrestre de l’ordre de 40 tonnes par seconde [4].

L’eau, berceau cosmique

On sait que la couche d’ozone protège la vie des rayonnements UV du soleil. Par contre, l’eau autour des protoplanètes protège le milieu gazeux nourricier d’une trop forte température. Car, celle-ci détruirait tout édifice moléculaire pouvant apparaître par réaction en phase gazeuse [5]. À une échelle encore plus grande, l’eau a été détectée sous forme de glace amorphe au sein de la Voie lactée. Ainsi que dans 18 autres galaxies sur 103 testées [6].

Enfin, un quasar est un objet astronomique formé d’un gigantesque trou noir dévorant son disque de gaz et de poussière. Par là-même, il émet une énorme quantité d’énergie dans l’espace. De fait, très récemment, des masses d’eau considérables (25 000 fois la masse du soleil) ont été détectées autour d’un quasar âgé de 12 milliards d’années [7] !

On peut ainsi se déplacer très loin dans l’espace et aussi remonter très loin dans le temps. Quoi que l’on fasse, on retrouve bien l’eau à l’origine de toute chose.

Références

[1] B. Nisini, «Water’s Role in Making Stars», Science,290(2000) 1513-1514.

[2] R. L. Snell,  J. E. Howe, M. L. N. Ashby , E.A. Bergin, G. Chin, N. R. Erickson, P. F. Goldsmith, M. Harwitt, S.C. Kleiner, D. G. Koch, D. A. Neufeld, B. M. Patten, R. PLume, R. Schieder, J.R. Stauffer, V. Tolls, Z. Wang, G. Winnewisser, Y. F. Zhang  & G. J. Melnick, «Water abundance in molecular cloud cores», Astrophys. J.,539(2000) L101-105.

[3] P. Hartogh, J. Crovisier, M. de Val-Borro, D. Bockelée-Morvan, N. Biver, D.C. Lis, R. Moreno, C. Jarchow, M. Rengel, M. Emprechtinger, S. Szutowicz, M. Banaszkiewicz, F. Bensch, M. II. Blecka, T. Cavalié, T. Encrenaz, E. Jehin, M. Küppers, L.-M. Lara, E. Lellouch, B. M. Swinyard, B. Vandenbussche, E. A. Bergin, G. A. Blake, J. A. D. L. Blommaert, J. Cernicharo, L. Decin, P. Encrenaz, T. de Graauw, D. Hutsemekers, M. Kidger, J. Manfroid, A. S. Medvedev, D. A. Naylor, R. Schieder, N. Thomas, C. Waelkens, P. R. Roelfsema, P. Dieleman, R. Güsten, T. Klein, C. Kasemann, M. Caris, M. Olberg & A. O. Benz, «HIFI observations of water in the atmosphere of comet C/2008 Q3 (Garradd)», Astronomy & Astrophysics,548(2010) L150-155.

[4]  L.A. Frank, J.B. Sigwarth  & J.D. Craven, «On the influx of small comets into the earth’s upper atmosphere. II Interrpetation.» Geophys. Res. Lett.,13 (1986) 307-310.

[5] T. Bethell  & E. Bergin, «Formation and survival of water vapor in the terrestrial planet-forming region», Science,326(2009) 1675-1677.

[6] P. Jenniskens & D. F. Blake, «Structural transitions in amorphous water ice and astrophysical implications», Science265 (1994) 753-756.

[7] C. M. Bradford, A. D. Bolatto, P. R. Maloney, J. E. Aguirre, J. J. Bock, J. Glenn, J. Kamenetzky, R. Lupu, H. Matsuhara, E. J. Murphy, B. J. Taylor, H. T. Nguyen, K. Scott & J. Zmuidzinas, «The water vapor spectrum of APM 08279+5255; X-ray heating and infrared pumping over hundreds of parsecs», Astrophys. J. Lett., 741 (2011) L37-44.

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