Épisode 58 Covid-19, décembre 2021. Vice et vertu sont parents comme diamant et charbon…
Karl Kraus
Toxicité du graphène et de ses dérivés
Voici donc le troisième volet de mes chroniques consacrées au graphène. Après lecture des deux dernières chroniques, vous savez désormais ce qu’est le graphène, ses dérivés et leurs applications. Nous pouvons de ce fait maintenant analyser avec lucidité les diverses informations qui circulent sur internet et les réseaux sociaux au sujet du graphène. La première question est de savoir s’il y a du graphène ou l’un de ses dérivés dans les produits injectés massivement à l’échelle mondiale. Mais, avant cela, passons en revue ce que l’on sait de la toxicité de ces matériaux. Sur le plan biologique de nombreuses études ont examiné la bio-compatibilité et la toxicité des nanoparticules de la famille du graphène (NFGs) in vivo et in vitro. En général, les NFGs peuvent exercer différents degrés de toxicité chez les animaux ou les modèles cellulaires.
Les NFGs suivent différentes voies pour pénétrer à travers les barrières physiologiques. Puis, elles se distribuent dans les tissus ou se localisent dans les cellules. Leur excrétion hors du corps se fait avec des durées très variables. Les facteurs qui déterminent la toxicité des NFGs sont : la taille latérale, la structure de surface, la fonctionnalisation, la charge, les impuretés, les agrégations et l’effet corona. Plusieurs mécanismes typiques sous-tendent la toxicité des NFGs. Par exemple, la destruction physique, le stress oxydatif, les dommages à l’ADN, la réponse inflammatoire, l’apoptose, l’autophagie et la nécrose. Dans ces mécanismes, les voies dépendantes des récepteurs TLR (toll-like receptors), du facteur de croissance transformant β (TGF-β) et du facteur de nécrose tumorale alpha (TNF-α) sont impliquées dans le réseau de voies de signalisation. Le stress oxydatif joue aussi un rôle crucial.
Spectroscopie Raman
Toutefois, vu les intérêts mis en jeu, les études restent, comme très souvent contradictoires. Le mieux est donc d’oublier les études biologiques pour en revenir aux fondamentaux : la physique. Ainsi, pour savoir si une substance particulière se trouve présente dans un échantillon, il faut faire des analyses. Dans le cas des NFGs et des dérivés du carbone, c’est la spectroscopie Raman qui doit être utilisée en priorité. En particulier, il est parfaitement inutile de se précipiter sur les microscopes électroniques. L’emploi de ces machines doit arriver dans un second temps. Une fois que l’on est sûr de la présence de graphène. De plus, il ne suffit pas de détecter, il faut aussi doser. C’est-à-dire avoir une idée de la concentration. Car, comme on le sait, ce n’est pas la substance qui fait le poison, mais la dose.
C’est ici la spectroscopie Raman qui est la technique de choix pour la détection des dérivés du carbone. Les différents pics du graphène renseignent notamment sur la qualité du matériau, le nombre de couches de graphène, la nature des contraintes, etc. Dans le graphène, l’excitation laser crée deux pics principaux dans le spectre Raman. Le premier est noté G et il apparaît autour de 1 500 cm-1. Il s’agit d’un mode vibratoire primaire dans le plan. Le second est noté 2D et se trouve aux environs de 2 700 cm-1. Il caractérise la couche de graphène et se trouve être une harmonique de second ordre d’une vibration différente, notée D située autour de 1 300 cm-1. Cette bande caractérise le taux de défaut dans le matériau, puisqu’elle est absente dans le graphène monocouche.
Quelques exemples
Le rapport des intensités des pics I2D/IG donne une estimation du nombre de couches dans la zone d’étude. Ainsi pour I2D/IG > 1, on a une monocouche de graphène, tandis que pour I2D/IG <1, on s’oriente vers des structures multicouches. Un petit test vous permettra de savoir si vous avez compris. Ainsi, le spectre à gauche de l’image associée à cette chronique présente un pic 2D plus intense que le pic G. Le pic “D” est quant-à-lui très faible. Il s’agit donc de toute évidence d’un graphène monocouche. Le spectre du milieu présente un pic D clairement visible et un pic G plus intense que le pic “2D”. Nous avons ici à faire avec un graphène multicouche. Enfin le spectre à droite ne présente aucun des pics caractéristiques du graphène, puisqu’il s’agit de graphène oxydé.
Donc, quand on m’affirme qu’il y a du graphène dans les produits Pfizer ou Moderna, c’est ce type d’évidence que j’attends. Surtout pas des clichés de microscopie électronique. La raison en est simple et tient au fait que le monde nanométrique a ses propres lois, très différentes du monde macroscopique. Prenons un exemple. Soit une particule de graphène carrée de taille égale à 50 nanomètres. Ce chiffre n’est pas pris au hasard, mais j’y reviendrais plus loin. Cela correspond ainsi à une surface de 50×50 = 250 nm2 = 250×10-18 mètres. Supposons que je dispose d’une grille de microscopie électrique faisant 1 cm2. Pour balayer cette surface dans son ensemble à l’échelle de 50 nm, il me faudra explorer 10-4/2,5×10-16 = 4×1013 zones. Si l’on estime qu’il faut 0,1 secondes pour explorer une zone, il nous faudra disposer d’un temps égal à 4×1012 secondes. Mine de rien, cela signifie qu’il me faudra environ 127 000 années !
Artefacts de la microscopie électronique
En microscopie électronique, on n’explore donc qu’une partie infime de la surface disponible. Et, si d’aventure on détecte l’objet cherché, il faut encore décider s’il appartient bien à l’échantillon testé. Car, à cette échelle, on peut tout simplement observer une poussière de la pièce qui s’est déposée sur la grille. Il peut aussi s’agir d’une particule qui s’est formée sur place sous l’action du faisceau d’électrons. Parce que toute matière organique chauffée en l’absence d’oxygène se carbonise. Et, carboniser signifie faire du graphite qui par exfoliation donnera du graphène. D’où l’intérêt d’avoir fait auparavant un spectre Raman pour être sûr que le graphène est bien là avant l’observation au microscope électronique. Sans spectre Raman, il est impossible de conclure. Et, qu’il soit clair que je parle ici de macro-Raman sur la solution et non de micro-Raman où l’on observe qu’une fraction infime de la surface disponible.
Rappelons aussi qu’en 2016, on a produit dans le monde 2,45 millions de tonnes de graphite. Et, que ce graphite donne par exfoliation du graphène. Observer du graphène sur une grille de microscope électronique ne suffit donc pas. Il faut en plus démontrer que ce graphène appartient bien à l’échantillon testé et non à l’air ambiant. Et, cela peut s’avérer très difficile et fastidieux. Bref, il faut de la rigueur et c’est bien ce qui manque dans toutes les études que j’ai pu voir. Il serait, en effet, très simple de montrer les spectres Raman des solutions injectées aux gens après avoir retiré le solvant. S’il y avait du graphène en quantité significative sur le produit sec obtenu, on serait fixé. Pourtant, que nenni. On ne nous montre que des clichés sur une toute petite fraction de la matière disponible.
Le Dr. Noack et ses “nano-rasoirs”
J’en viens maintenant à cette ténébreuse affaire d’un chimiste autrichien, qui aurait été assassiné quelques heures après avoir dénoncé les risques de l’hydroxyde de graphène. Ainsi, l’hydroxyde de graphène formerait des structures dans le flux sanguin d’environ 50 nm de large et 0,1 nm d’épaisseur. Elles agiraient comme de petites lames de rasoir dans le flux sanguin qui peuvent couper les vaisseaux sanguins. Une fois dans la circulation sanguine, elles y resteront pour toujours (à moins que la personne ne reçoive une transfusion sanguine pour les éliminer). Leur effet sur les vaisseaux sanguins est cumulatif. Plus elles restent longtemps dans la circulation sanguine, plus les vaisseaux sanguins sont endommagés au fil du temps. Cela crée des problèmes d’hémorragie dans tout le corps.
Que penser de tout cela ? Tout d’abord, le corps humain ne manque pas de ressources pour éliminer toute substance étrangère et potentiellement nocive. Affirmer le contraire ne milite en faveur de l’argumentaire développé. Rien ne reste éternellement dans la circulation sanguine. Quid de l’idée de ces lames de rasoir qui couperaient les vaisseaux sanguins ? Voilà une affirmation bien étrange pour un spécialiste des nanotechnologies. En effet, oublions un instant la biologie et considérons l’aspect matériau. Tout matériau possède ce que l’on appelle un module de Young qui décrit comment le matériau réagit sous l’effet d’une contrainte mécanique. Maintenant, pour quelle raison les lames de rasoir coupent-elles ? Simplement parce qu’elles bien sont bien affûtées.
Comment fonctionnent les rasoirs ?
Disons qu’une bonne lame de rasoir possède une largeur de 0,1 mm qui se termine avec un tranchant de 5×10-4 mm d’épaisseur. La surface développée est donc de 5×10-11 m2. Or, la force de préhension de la main peut être estimée à 300 N. Si cette main tient une lame de rasoir, elle peut ainsi exercer une pression P = 300/5×10-11 = 6×1012 Pa = 6 TPa. C’est bien évidemment une pression énorme dont l’origine se trouve dans le tranchant de très faible épaisseur. Dans ces conditions, que penser d’un feuillet de graphène dont l’épaisseur est de 0,34 nm ? C’est-à-dire 1 000 fois plus fin que le tranchant d’une lame de rasoir ? Notre expérience macroscopique nous dit que cela coupera encore mieux.
Sauf, qu’encore une fois, nous sommes à l’échelle du nanomètre et non du millimètre. Considérons donc les chiffres avancés par notre cher Dr Noack. Soit L la taille d’une nanoparticule de graphène de densité ρ = 0,77 mg·m-2 et e son épaisseur. La pression développée par ce « nano-rasoir » sera de ce fait P = ρ×L×L×g/(e×L) = ρ×L×g/e. Ici, g = 9,81 m·s-2 est l’accélération due à la pesanteur. Comme e = 0,34 nm, il vient P(Pa) = 0,77×10-6×9,81×L/0,34×10-9 = 22 217×L. Si L = 50 nm comme annoncé par le Dr. Noack, on aura une pression P = 0,00111 Pa. Un tissu biologique ayant un module de Young d’une centaine de MPa, il sera totalement insensible à une pression aussi faible.
De l’art d’affoler les gens
Pour avoir une pression plus forte, il faut donc augmenter la taille L. Avec L = 1 mm, on passe ainsi à P = 22 Pa. Toujours insuffisant. Une autre solution serait de considérer un coin et non un aplat. On aurait alors P(Pa) = ρ×L×L×g/(e×e) = 65×1012×L2. Avec L = 50 nm, on aura une pression P = 0,16 Pa. Toujours pas de quoi s’inquiéter. Par contre, avec L = 10 µm, on passe à P = 6,5 kPa et avec L = 1 mm, P = 65 MPa. Là, on commence à être bon. Sauf que notre rasoir n’est plus vraiment “nano”. Car, une cellule eucaryote, c’est 10 µm et non 1 mm…
La conclusion est donc que ce cher Dr Noack cherche à nous affoler avec son histoire de nano-rasoirs. S’il a ses raisons, ces dernières n’ont rien à voir avec la science. D’ailleurs, toute sa vidéo est affolante avec des images choc plutôt horribles à voir. Ce n’est pas comme cela qu’un vrai scientifique s’exprime. D’ailleurs aux dernières nouvelles, il n’aurait jamais été agressé. Il semblerait qu’il soit mort d’une crise cardiaque chez lui. Vu son état excitation dans la vidéo diffusée, cela n’a rien de surprenant. Car, le mot “attaque” utilisée par sa compagne désignait une crise cardiaque et non une attaque en bonne et due forme. Voici un autre lien qui démystifie ce qui s’est réellement passé.
Conclusion
Des personnes malveillantes ont donc cherché à monter cet incident en épingle. Ce faisant, ils utilisent les mêmes armes de propagande que les pro-injections. Comme les armes sont les mêmes, il y a ainsi fort à parier que les mêmes personnes pro-injections, se trouvent derrière ce type désinformation. L’idée est probablement de ridiculiser les anti-injections. C’est bien sûr machiavélique, mais redoutablement efficace. Pour conclure sur ce sujet, retenez qu’on ne rentre pas dans le monde des nano-objets avec ses gros godillots. Il est fort probable que le graphène et ses dérivés soient cytotoxiques. Mais, cela passe plus par un stress oxydatif puissant que par des actions mécaniques de type lames de rasoirs. La présence de NFGs dans les produits injectés n’est ainsi en rien démontrée.
Pour ce qui me concerne, toute cette histoire autour des NFGs me semble être un simple écran de fumée. Pendant que les gens s’excitent sur ce sujet, ils ne discutent pas du vrai problème : l’injection de matériel génétique non humain dans un corps humain. Il ne faut pas se tromper de combat et songer que l’adversaire est extrêmement malin, au sens diabolique du terme. On ne peut certes pas nier qu’il y ait une folie autour des NFGs. Mais, c’est en vertu de leurs propriétés potentiellement extraordinaires. Ainsi va la recherche pour un monde meilleur. Car, ce n’est pas la technologie qui pose problème, mais la manière dont on l’exploite sans aucune conscience.
Par Marc HENRY : Le véritable obscurantisme ne consiste pas à s’opposer à la propagation des idées vraies, claires et utiles, mais à en répandre de fausses.
Johann Wolfgang Goethe