Jeux olympiques, Paris 2024
Je reviens sur la récente affaire des jeux olympiques 2024. Affaire, où la boxeuse algérienne Imane Khelif se retrouve au cœur d’une controverse. Car, elle semble avoir été disqualifiée des championnats du monde de boxe amateur à New Delhi en 2023. Ceci, en raison d’un taux élevé de testostérone retrouvé dans son sang à la suite d’analyses. La boxeuse, à cause de ce « dérèglement hormonal », est accusée, notamment sur les réseaux sociaux, d’être une femme « trans ». La polémique autour d’Imane Khelif a été encore plus alimentée suite à l’abandon en huitième de finale, ce jeudi premier août, de son adversaire italienne Angela Carini, après seulement 46 secondes d’épreuve.
Une première question est donc de savoir pour quelle raison les critères de sélection sont différents entre les championnats du monde et les Jeux Olympiques. La seconde est de savoir si Imane Khelif est, biologiquement parlant, une femme ou un homme. Certaines personnes naïves pourraient croire qu’il suffit de déshabiller la personne. Si on observe deux paires qui pendouillent (« duos habet et bene pendentes »), on a affaire à un homme. Sinon, c’est qu’il s’agit d’une femme. Bon d’accord, la papesse Jeanne est un mythe qui en a berné plus d’un et plus d’une. Et, aucun pape ne s’est jamais fait tripatouiller les couilles. Sauf que…
Caryotype, génotype et phénotype
Certaines personnes peuvent être atteintes de syndrome d’insensibilité complète aux androgènes (SICA). Dans ce cas, elles peuvent être de génotype masculin (caryotype XY) avec un très fort taux de testostérone plasmatique. Mais, en étant dotées d’un phénotype typiquement féminin à la naissance avec développement normal des seins et des hanches. Ici, il y a eu mutation du gène du récepteur aux androgènes. Ainsi, la testostérone produite par les testicules ne peut pas masculiniser les tissus. D’où un individu infertile d’apparence féminine, mais dépourvu d’utérus et d’ovaires, n’ayant donc pas de « règles ». Elles sont toutefois pourvues de testicules en position abdominale (cryptorchidie), pouvant parfois faire croire à une hernie. L’incidence est estimée entre 1/20 000 et 1/99 000 naissances vivantes de garçons.
En revanche, on ne trouve, chez ces personnes, aucun corpuscule de Barr. Absence donc d’hétérochromatine facultative liée à la répression de l’expression d’un de deux chromosomes X. Et, généralement, la présence d’un corpuscule de Barr dans les cellules signe le sexe femelle. C’est ce qui a conduit à utiliser ce test comme test de féminité pour les épreuves sportives. Hélas, les femmes ayant caryotype XY, XXY ou X0 (absence du second chromosome X) échouent à ce test. D’où son abandon en 1992.
Il y a également des cas d’insensibilité partielle. L’aspect peut alors être soit féminin, soit masculin. Il peut aussi y avoir ambiguïté génitale. Avec impossibilité de faire la différence entre un pénis ou un clitoris développé. Ou bien encore avec une fusion des grandes lèvres ou « scrotum bifide ».
Sexe et insectes
Rappelons que le système de détermination sexuelle, via le caryotype, date de 1905. Ceci, de manière indépendante, par Nettie Maria Stevens (1861-1912) et Edmund Beecher Wilson (1856-1939). Il ne s’avère pas, ici, d’une grande utilité. Car, ce système affirme que les femelles ont des chromosomes de types identiques (XX). Alors que les mâles ont des chromosomes de types distincts (XY). Mais, comme on vient de le voir, il peut très bien y avoir des « femmes » XY. Ici, c’est une mutation qui rend inactif le gène SRY. Ou bien alors des « hommes » où une translocation du gène SRY chez un embryon XX rend le phénotype masculin. Car, rappelons que cette différenciation XX ou XY fut initialement mise en évidence, chez les insectes [1][2]. Pas chez les humains.
La différentiation sexuelle XX ou XY est ainsi un bel exemple d’une chose dite « simplexe ». C’est-à-dire une chose « complexe » dont on a déconstruit la complexité. Ceci, au moyen d’une explication épurée des détails. Ou bien, si vous préférez, la simplexité est l’art de rendre intelligibles, lisibles, compréhensibles des choses complexes. C’est une notion émergente et un domaine d’étude nouveau en systémique, ingénierie et neurosciences. Rendre « simplexe » un objet artificiel est donc un processus d’ingénierie complexe. L’idée est de simplifier et d’épurer au maximum un ensemble puissant de fonctionnalités. Appliqué à un objet naturel, cela consiste à proposer une explication épurée des entrelacements qui rendent la chose « complexe ».
Un peu d’étymologie
Sur un plan étymologique, nous rencontrons ici le radical thématique “plekô” (“πλεκω”). Radical, qui, hélas, ne possède pas de correspondant exact hors du grec. Sauf, via un élargissement avec « t », soit « plecto » signifiant « tresser » ou « entrelacer ». D’où la « complexité » où le préfixe latin « com » signifie « avec, ensemble », donnant le sens de : « avec tressage ou entrelacement ». Ou bien encore la « simplexité » avec l’adverbe latin « semel » signifiant « une seule fois ». Donnant le sens de « une seule fois tressé ».
Toutefois, le latin a eu un itératif en — are de ce radical « plêko », donnant « plicare » signifiant « plier » » ou « replier ». D’où les verbes « implicare » (impliquer), « explicare » (expliquer) ou bien encore « complicare » (compliquer). Est donc « compliquée » toute chose qui plusieurs fois repliée sur elle-même. Une chose par conséquent moins simple, ou bien plus difficile à comprendre. Le mot « complexe », ne doit donc en aucun cas être confondu avec le mot « compliqué ». De même, le mot « simplexe » ne doit jamais être confondu avec le mot « simple ».
Certaines personnes, les « observateurs » adorent la complexité en cherchant toujours à aller dans les moindres détails. Alors que d’autres, au contraire, les « créateurs » la détestent, lui préférant la simplexité. Et, puis, il y a aussi les pervers, qui, eux, détestent la simplicité, recherchant systématiquement la complication. Ici, hors de question d’avoir une seule chose avec un simple pli. Non, on replie ladite chose sur elle-même jusqu’à la rendre compliquée. Ceci, jusqu’à en avoir la nausée.
Un monde compliqué
Tout ceci pour en venir à tout ce qui se passe aujourd’hui dans la société. Soit, une transition entre un état passé du monde à complexité entrelacée vers un nouveau monde compliqué. Car, maintes fois replié sur lui-même. Ceci étant posé, revenons au problème de la détermination du sexe. Ce qui est sain et légitime, c’est d’aller de la complexité vers la simplexité. Ce qui est pervers et dangereux, c’est d’aller de la simplicité vers la complication. Comme on l’a vu plus haut, la sexualité est intrinsèquement un phénomène complexe. Et, dans une recherche de simplexité, on est arrivé au caryotype XX ou XY. Ou bien, alors, à la présence ou l’absence du corpuscule de Barr. Sauf, que, ce faisant, on ne s’est intéressé qu’à 14 mol‰ de ce qui constitue un homme. Et, 10 mol‰ de ce qui constitue une femme.
On s’y prend donc par le mauvais bout de la lorgnette. Par conséquent, les pervers peuvent s’en donner à cœur joie, en brouillant encore plus les cartes. Car, le caryotype laisse une ambiguïté de fond sur le sexe réel. Puis il y a aussi la chirurgie esthétique, la prise d’hormones, la prise de psychotropes. Tout ceci contribue, encore plus, à gommer toute différence sexuelle. D’où l’extrême complication actuelle LGBTQ(H)IA2S+, pour Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Transgenre et Trans, Homosexuels ou en Questionnement, Intersexe, Asexuel ou Agenre, ou bien encore 2-Spirituel… Bref, il y a tellement de plis et de replis autour de la « sexualité » que l’on finit par en perdre son latin ou son grec…
De l’eau, toujours de l’eau
Mais, si l’on oublie cette matière organique très minoritaire qui attire l’œil comme un aimant attire le fer, que reste-t-il ? Réponse : 986 mol‰ d’eau salée chez l’homme contre 990 mol‰ d’eau salée chez la femme. Et, si une telle différence vous semble trop insignifiante, regardons, simplexement, les proportions d’eau intracellulaire (ICW) et d’eau extracellulaire (ECW). Résultat, chez un homme : ICW = 533 mol‰, ECW = 431 mol‰. Contre ICW = 678 mol‰ et ECW = 297 mol‰ chez une femme. Là, à ce niveau de simplexité, il n’y a plus aucun doute. Impossible, ici, de faire passer un homme pour une femme et vice versa.
La recherche de simplexité a permis de trancher le débat de manière claire et précise. Ainsi, soit une personne qui file un gnon à une autre n’ayant pas la force musculaire pour riposter. Vous savez alors automatiquement que la personne qui file le gnon possède plus d’eau extracellulaire que celle qui le reçoit. Par conséquent, il s’agit bien d’un combat entre un homme et une femme. Et, non, d’un combat entre deux hommes ou deux femmes. L’eau et le métabolisme sous-jacent ne sauraient pas mentir. Alors que l’apparence physique ou le caryotype peuvent toujours mentir, ou bien, alors, être ambigu.
Mise en (s)cène
La notion de simplexité s’applique également à cette séquence forte des JO 2024 à Paris qui s’est ouverte sur une image symbolique. Celle où l’on voit la DJ obèse Barbara Butch, aux platines. Et, entourée d’une poignée de drag queens comme Nicky Doll, Paloma ou bien encore Piche. Personnages bien connus des fans de « Drag Race France ». Ce tableau était intitulé « Festivités ». Il présentait des personnalités de la mode et de la danse, notamment du voguing. Et, puis, on y voit par ailleurs Philippe Katerine, peint en bleu et quasi-nu, au premier plan. Je ne reviendrai pas ici sur les nombreuses polémiques suscitées par cette mise en scène de Thomas Jolly, directeur artistique de « La Piccola Familia ». Pour décoder cette image symbolique, on pourra relire ma chronique sur les jeux et les rituels.
Non, la question qui se pose est de savoir si l’on a affaire à une simplexification. Ou bien, au contraire, à une complication. Pour ce qui me concerne, tout cela apparaît extrêmement compliqué. Certains y ont aussi vu une parodie du tableau « L’Ultima Cena », soit « le Dernier Repas », de Léonard de Vinci. Mais, là aussi, dans ce cas, aucune simplexification.
Alors, qu’il existe un bel exemple de simplexification de cet œuvre, réalisée par Salvador Dali (voir image illustrant cette chronique). Ici, au menu, un dépouillement total incitant à la prière et au recueillement. Et, la présence, en arrière-plan, de l’être humain crucifié, mais sans tous les détails sordides liés à la crucifixion. Et, puis l’encadrement de toute la scène dans le dodécaèdre pentagonal, qui, pour les initiés, évoque le nombre d’or. Nombre qui ajoute une dimension spirituelle à toutes choses. Et, qui invite à explorer les mystères et la connaissance. Bref, on aurait pu faire quelque chose de beau et de noble. Au lieu de cela, on a choisi la laideur et la bassesse. Le ras des pâquerettes pour donner une image de la France au monde entier.
Notons également que les controverses autour de cette cérémonie d’ouverture n’ont pas été à la hauteur non plus. Aucune envie d’élever le débat, ou bien d’analyser de manière lucide. Beaucoup de personnes sont parties directement dans l’émotif avec la dichotomie, j’aime ou, au contraire, je déteste. Ici, au moins, si vous avez eu la patience de me lire jusqu’au bout, vous aurez appris des choses. Du moins, je l’espère bien sincèrement. Bons JO à celles et ceux qui apprécient ce genre de spectacle. Pour les autres, il reste toujours l’écoute des musiques au diapason de l’eau à 429,62 Hz de fréquence. Avec un bon casque Beyerdynamic DT770 Pro 80 ohms, vous pourrez échapper à ce monde pervers et ténébreux. Monde orienté vers ce qui est laid et médiocre. Pour contrebalancer, je vous recommande, plus particulièrement, le Canon du bonheur. Une simplexification magistrale, par Tommi Jack’s, du célèbre Canon de Pachelbel.
Références
[1] E. B. Wilson, « The chromosomes in relation to determination of sex in insects », Science, no 22, 1905, p. 500–502
http://www.esp.org/foundations/genetics/classical/ebw-05.pdf
[2] N. M. Stevens, “Studies in spermatogenesis with especial reference to the « accessory chromosome »”, Washington DC : Carnegie Institution Publication, 1905 : n° 36, part 2.
http://old.esp.org/foundations/genetics/classical/holdings/s/nms-05-spermatogenesis-1.pdf
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