Sources de la salinité
La salinité de l’océan provient de 2 sources distinctes. Premièrement, de l’altération de la croûte océanique. Deuxièmement de l’hydrothermalisme océanique. De nos jours, l’altération est la source dominante de salinité. Mais, durant l’Hadéen ou l’Archéen, il semblerait que ce soit plutôt l’hydrothermalisme qui ait été dominant. Le volume des continents à cette époque était plus faible, de l’ordre de 10 à 15% du volume actuel. Car, la surface de la Terre était formée de multiples petites plaques. Les modèles suggèrent que les dorsales océaniques étaient 10 fois plus longues durant l’Archéen. Donc, la production de nouvelle croûte océanique au niveau de ces rides médio-océaniques était 2 à 3 fois plus importante qu’aujourd’hui.
Durant cette période, l’activité hydrothermale de ces dorsales créait beaucoup d’espèces dissoutes. Il en était de même pour les interactions des fluides chauds avec la croûte océanique. C’étaient les deux principaux phénomènes caractérisant cette période. De grandes quantités de fer provenait des crêtes de ces dorsales. Ceci prouve donc que c’est le manteau qui tamponnait la chimie océanique de cette époque. Le Protérozoïque marque la fin de la dominance des sources hydrothermales régulatrices de la salinité océanique. C’est aussi le début du contrôle par l’érosion des continents.
Évolution de la salinité
La mesure des variations des rapports isotopiques du strontium (Sr) et du néodyme (Nd) dans les sédiments marins de l’Archéen et du Protérozoïque permet de suivre les changements de cette salinité océanique. En effet, a croûte océanique est enrichie en rubidium (Rb). Car, cet élément est incompatible avec le magma cristallisé formant la croûte. Ce dernier préfère donc rester dans le magma liquide résiduel. Or, on sait que l’isotope 87Rb se désintègre en isotope 87Sr. Ceci fait que les rapports 87Sr/86Sr de la croûte augmente par rapport à celle du manteau qui se trouve corrélativement appauvrie en rubidium. Ainsi, les rapports isotopiques 87Sr/86Sr de carbonates archéens ont des valeurs comprises entre 0,7025 ± 0,0015 et 0,7031 ± 0,0008.
Ces valeurs sont proches de celles caractéristiques du manteau durant l’Archéen (< 0,703). Or, les carbonates actuels ont un rapport isotopique supérieur à 0,715. Ceci indique que la source de strontium dans l’océan a évolué avec un enrichissement progressif en 87Sr en provenance de la croûte. Les études isotopiques de microbialites Archéennes des plateaux calcaires de Campbellrand en Afrique du Sud ont permis de contraindre le rapport entre les sources de salinité hydrothermales et continentales comme le montre la figure suivante pour les rapports 143Nd/144Nd et 87Sr/86Sr mesurés dans des microbialites âgées de 2,52 milliards d’années :
Eau primordiale
Ces rapports montrent un mélange des réservoirs de néodyme et de strontium entre le manteau et la croûte océanique. En faisant un double bilan massique et isotopique, il est possible d’estimer le rapport entre les flux du manteau et continentaux. On considère ici les éléments dissous dans l’océan au moment de la transition entre l’Archéen et le Protérozoïque. Cet évènement s’est produit il y a 2,5 milliards d’années. Ceci suggère que flux d’éléments depuis le manteau vers les océans fût 3 fois plus important que le flux continental. Alors que ce rapport est de nos jours compris entre 0,3 et 0,5. Nous arrivons au terme de ce petit voyage consacré à l’eau primordiale. Vous ressentez peut-être maintenant l’extraordinaire chance que nous avons de pouvoir connaître tout cela. Juste une dernière page pour savoir dans quelle mesure l’eau de mer moderne diffère de l’eau de mer Hadéenne…
Référence
Daniele L. Pinti (2005), «The Origin and Evolution of the Oceans», Lectures in Astrobiology, Vol. 1. M. Gargaud, B. Barbier, H. Martin & J. Reisse Eds, Springer-Verlag, New York, Berlin, p.83-112.
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