Épisode 66, avril 2022. La majorité a toujours raison, mais la raison a bien rarement la majorité aux élections.
Jean Mistler
Intérêt des chiffres absolus et relatifs
Qui est arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle 2022. Si vous répondez « Emmanuel Macron », vous êtes tombé dans le panneau. Mais, rassurez-vous, vous n’êtes pas tout seul. Parce qu’il existe dans ce pays un parti qui est systématiquement écarté du calcul. Pour ce faire, on utilise des chiffres relatifs (pourcentages) et non des chiffres absolus (nombre de voix). De fait, pour obtenir un chiffre relatif, je dois faire une division. Et, là, réside le point de départ de toute manœuvre douteuse. Par quoi va-t-on diviser ? La question est cruciale, car cette division va permettre de promulguer un message politique. Bien évidemment, le problème ne se pose pas avec les chiffres absolus. Puisqu’un chiffre absolu s’exprime avec une unité de mesure et non via un nombre sans dimensions.
Ces considérations sont tout à la fois étonnamment simples (diviser ou ne pas diviser) et étonnamment complexes (par quoi diviser). Faisons donc le point. Tout d’abord, une valeur absolue ne peut pas être détachée de son contexte. C’est ce qui confère aux chiffres absolus leur immense intérêt. Dans le cas qui nous préoccupe, ce contexte est tout simplement le nombre total d’électeurs inscrits sur les listes électorales. Impossible de tricher avec des chiffres absolus acquis de manière honnête. Car, si j’essaye d’additionner des nombres de pommes et des nombres de poires, tout quidam lèvera les bras au ciel. C’est le contexte explicite (pomme ou poire) qui permet d’éviter ce genre de magouille.
Danger des pourcentages
Passons maintenant aux pourcentages. Contrairement aux chiffres absolus, le contexte est ici devenu implicite. Par exemple, en France, on obtient le pourcentage en divisant par le nombre de suffrages exprimés. C’est-à-dire que l’on « oublie » les bulletins blancs, nuls ou les abstentionnistes. La bonne question est : « pourquoi procède-t-on ainsi et pas autrement ? ». On pourrait, diviser notamment par le nombre total d’électeurs. On atteindrait alors, comme en science, des pourcentages « honnêtes » et non trafiqués. Mais, non, pour les élections, on change le contexte avant de faire la division. Et, cela passe comme une lettre à la poste. On pense avoir en face de soi des chiffres honnêtes. Alors, qu’en vérité, ils sont bel et bien « trafiqués » par le changement de contexte.
D’où une règle d’or que l’on doit impérativement retenir. Toute magouille portant sur des données chiffrées consiste, à la base, à mélanger des données ayant des contextes différents. Puis, à exprimer ces données en pourcentage pour rendre le contexte implicite. Seuls les initiés aux statistiques, peuvent ainsi détecter la magouille. Les autres, en bonnes poires bien mûres, gobent le résultat sans réfléchir. Seulement voilà. J’ai été initié aux statistiques. Et, surtout, j’ai grandement travaillé la notion d’information et son corollaire : l’exformation (ou contexte). Je me suis même fendu d’un petit livret sur le sujet disponible sur ce site. Donc, la manière dont les médias ont traité ce premier tour m’a profondément choqué. Que des pourcentages. Et, donc, que des contextes implicites.
Les vrais résultats en chiffres absolus
Il est donc maintenant temps de vous révéler les vrais résultats de ce premier tour. J’utiliserais évidemment des chiffres absolus et non des pourcentages. Comme d’usage je classe les valeurs par ordre décroissant du nombre d’électeurs :
1. Abstentions, blancs ou nuls = 12 101 366
2. Emmanuel Macron = 9 785 587
3. Marine Le Pen = 8 136 369
4. Jean-Luc Mélenchon = 7 714 949
5. Éric Zemmour = 2 485 935
6. Valérie Pécresse = 1 679 470
7. Yannick Jadot = 1 628 337
8. Jean Lassalle = 1 101 690
9. Fabien Roussel = 802 615
10. Nicolas Dupont-Aignant = 725 356
11. Anne Hidalgo = 616 651
12. Philippe Poutou = 268 984
13. Nathalie Arthaud = 197 184
On voit donc ainsi, très clairement, qu’Emmanuel Macron n’est pas réellement le vainqueur de ce premier tour. En nombre absolu d’électeurs potentiels, il n’y a pas photo. Une très large majorité d’électeurs ne se reconnaissent tout simplement pas dans les douze candidats. Pour quelle raison passe-t-on sous silence ce fait fondamental dans les médias ? On notera aussi l’excellent score de Jean Lassalle, qui n’était crédité que de 0,5% des intentions de vote et qui termine à 3,1%. Une telle erreur d’appréciation n’est bien sûr pas due au hasard. Elle démontre qu’il vaut mieux ignorer toute information venant des instituts de sondage officiels. Parce qu’ils sont tout, sauf neutres et objectifs, dans cette affaire.
Absurdité du système
Cela devrait faire réfléchir sur l’absurdité de notre système électoral. Mais, le pire est à venir. Car, 16 119 481 électeurs se retrouvent, de fait, complètement squeezés au second tour. S’ils veulent voter, ils devront s’exprimer par un choix binaire. Réduire la complexité de gestion d’un pays à seulement deux personnes. Ils peuvent aussi s’abstenir ou voter blanc, venant faire grossir encore les effectifs du premier parti de France. Mais, alors, ils verront leur vote mis de côté. Ils devront donc subir la dictature de l’un ou de l’autre des deux compères. Qui, bien sûr, se draperont dans une légitimité « acquise » dans les urnes. Voter pour adhérer à l’un, ou bien voter pour rejeter l’autre ? Si, en termes de chiffres, cela importe peu, c’est totalement différent en termes de contexte.
Nous y revoilà, donc. Le contexte, toujours lui. Le grand absent du débat politique actuel. Car, au fond, adhérer à des idées, c’est bel et bien préférer un certain contexte à un autre. Il y a, en effet, derrière toute adhésion, un choix mûri et réfléchi. Mais, pour rejeter, nul n’est besoin de contexte précis. On rejette par insatisfaction, parce que rien de ce qui est proposé ne convient. La pure logique voudrait que toute personne qui ne se reconnaît pas dans les deux contextes proposés s’abstienne… Imaginez le résultat : 12 101 366 + 17 221 171 = 29 322 537 de français mécontents. Et, en face : 9 785 587 + 8 136 369 = 17 921 956 électeurs motivés et « contents » d’avoir un candidat qui leur plaît. Bref, une minorité d’au plus 18 millions de personnes va pouvoir imposer son contexte à une majorité de 29 millions de personnes. Ce système absurde, c’est tout ce que vous voulez, sauf de la démocratie.
Mode de pensée classique ou quantique ?
Le mal réside, bien sûr, dans la non prise en compte des abstentions et des bulletins nuls ou blancs. Parce que gommer 12 millions de personnes d’un seul coup de plume est proprement scandaleux. Si l’on prend un peu de hauteur, on retrouve ici l’affrontement entre mode de pensée classique et mode de pensée quantique. Rappelons les bases. Soit, il existe une variable d’état, à partir de laquelle, on peut calculer toute autre variable physique. Soit, une telle variable d’état n’existe pas. Selon le théorème de Février-Destouches, s’il existe une variable d’état, alors on doit considérer, pour décrire la réalité physique, des nombres réels. Cela légitime complètement l’emploi d’une algèbre binaire de Boole (oui/non avec tiers exclu) pour les calculs. D’où l’existence d’un déterminisme et la possibilité de pouvoir tout calculer et prédire a priori.
Supposons, par contre, qu’il n’existe aucune variable d’état. Alors, notre théorème, stipule qu’il faut, pour décrire la même réalité physique, considérer des nombres complexes. C’est-à-dire, des nombres dotés d’une partie réelle (l’amplitude) et une partie imaginaire (la phase). Dans ce cas, on doit utiliser pour les calculs une algèbre de Heyting à au moins trois valeurs (tiers non exclu) : oui, non ou refus de choix, par exemple. D’où l’existence d’un probabilisme que l’on retrouve à la base du mode de pensée quantique. Plus rien n’est sûr ou certain. Ici, entre le blanc et le noir peuvent coexister une infinité de nuances de gris.
Tomber de Charybde en Scylla
Or, on sait que depuis 1930, la nature fonctionne selon le mode probabiliste et non selon le mode déterministe. Sauf, en politique, où l’on vous impose un choix binaire avec tiers exclu. Et, dès qu’il y a des exclus, il y a nécessairement des frustrés et des mécontents. Tant que ce nombre de personnes frustrées reste bas par rapport au nombre de personnes motivées, tout fonctionne à peu près bien. Mais, si c’est l’inverse qui se produit, on court à la catastrophe sociale. Le premier mandat d’Emmanuel Macron nous a donné un avant-goût de ce qui nous attend. Soyez sûrs, qu’en cas de second mandat, le tour de vis sera encore plus sévère et douloureux. Et, visera spécifiquement ceux qui n’auront pas voté pour ce sinistre personnage.
Quid, de la deuxième option ? À savoir un premier mandat pour Mme Marine Le Pen ? Ici, c’est un grand saut, les yeux bandés, dans l’inconnu. On ne peut, à ce niveau, s’appuyer sur les idées nauséabondes du père Le Pen. Puisque ces dernières ont été très clairement rejetées par sa fille. D’où une incertitude complète sur ce qu’elle fera ou pas. En effet, n’oubliez pas que vouloir est une chose et que pouvoir en est une autre. On peut avoir d’excellentes idées sur le papier. Et, être totalement incapable de les appliquer. D’où une autre source de chaos tout aussi inquiétante que celui que nous venons de vivre durant ces 5 dernières années.
Rejeter les choix binaires…
Alors, que faire ? Pour qui voter ? Cette question ne m’angoisse pas réellement. Je sais que le choix binaire que l’on nous impose au second tour de cette élection est totalement contre nature. Le refus de choix, conforme à la logique quantique basée sur une algèbre de Heyting à trois valeurs me semble être le bon. Je sais d’autre part, que cette attitude a été celle adoptée par au bas mot 12 millions de Français au premier tour. Tous, ne sont pas des idiots ou des crétins profonds. Je reste donc dans une confortable majorité de Français. Celle qui ne voit aucune solution aux problèmes actuels via l’élection d’une des deux marionnettes qui restent en piste.
Le problème est en vérité, beaucoup plus profond, beaucoup plus grave. Notre système politique est à bout de souffle. Les résultats le démontrent très clairement. Le système doit être modifié. Remettre la quantique et l’humain au centre du jeu. Bref, réformer les mentalités et augmenter le niveau des consciences. Rien de cela n’apparaît dans les promesses des deux finalistes. Donc, je resterai chez moi et profiterai ainsi de la nature environnante ainsi que de la musique des plantes. Si tous ceux qui ne se reconnaissent pas dans les deux candidats faisaient de même, il y aurait une crise politique profonde. Ce qui obligerait à bouger et sortir du modèle binaire avec tiers exclu, responsable de l’enfer actuel
Ensuite, lâcher prise…
Cela implique de rester sourd aux anathèmes lancés par ceux pour qui ne pas voter est un déni de démocratie. Car, quand une minorité impose sa volonté à une majorité (en chiffres absolus), cela n’a rien à voir avec la démocratie. En refusant de me faire injecter, on m’a déjà fait savoir que j’étais un irresponsable et un mauvais citoyen. Je n’ai donc aucun scrupule à ne pas aller voter, puisque je suis déjà un paria. Je reste ainsi conforme à l’étiquette que l’on me plaque sur le dos. Peu importe, car, sous l’étiquette, il y a un cœur qui bat, des intestins qui réagissent et un cerveau qui réfléchit. Donc, je voterai comme Jean Lassalle, blanc. Et, comme un blanc équivaut à une abstention, je ne me déplacerai même pas aux urnes. Surtout, au prix actuel de l’essence. Je suis peut-être un mauvais citoyen, mais sûrement pas un idiot qui applique aveuglément des consignes.
Pour le reste, que chacun fasse ce qu’il a à faire, en son âme et conscience. Et, tout ira bien. Puisque vous avez été clairement informé qu’une très large majorité de Français rejettent les deux candidats finalistes. Et, quand les chiffres sont honnêtement présentés, la décision finale coule de source, à condition de se respecter soi-même. Bonjour chez vous !
Par Marc HENRY
Les élections sont organisées pour le peuple démocrate de façon à choisir entre un candidat dictatorial ou un totalitaire libertaire.
Joe Zaza
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